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COVID-19 et diabète : état des lieux

 

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Ce numéro spécial de La SFD et Vous a pour objectif de vous aider à répondre aux demandes inquiètes de vos patients ayant un diabète à propos de COVID-19 et notamment :
- Quel est le sur-risque lié au diabète pour COVID-19 ?
- Quelles sont les caractéristiques spécifiques de COVID-19 chez les personnes ayant un diabète ?
- Quels traitements faut-il (ne pas) utiliser en cas de COVID-19 ?
- Quelles sont les précautions à prendre contre COVID-19 en cas de diabète ?
- Quelle attitude adopter par rapport au travail ?
Nous n’avons pas de réponse scientifiquement démontrée à toutes ces questions mais nous allons essayer de vous donner des éléments destinés à aider votre pratique.

 

Quel est le sur-risque lié au diabète pour COVID-19 ?
COVID-19 (COVID désigne la maladie : COronaVirus SARS CoV-2 Infectious Disease) est une maladie virale très contagieuse puisqu’une personne infectée peut contaminer au moins 2 à 3 personnes (alors que le chiffre est autour de 1 pour la grippe), ce qui explique sa progression exponentielle actuelle inquiétante. Globalement, plus de 80% des formes sont peu ou modérément symptomatiques, notamment chez l’enfant qui peut être porteur sain et participer ainsi à la dissémination de la maladie – d’où la fermeture des écoles. Les formes graves représentent 15 à 20% de toutes les formes et dans 5% un séjour en réanimation est nécessaire avec un taux de survie situé alors à environ 50%. Lorsqu’une maladie est très contagieuse et touche beaucoup de monde, 5% de cas graves peuvent représenter un nombre considérable de patients à prendre en charge en réanimation, ce qui peut dépasser les capacités médicales d’un pays. C’est pour étaler la survenue de ces cas et ne pas surcharger le système de santé que des mesures de confinement sont prises et actualisées. Un point épidémiologique quotidien est disponible sur le site de Santé Publique France (lien ci-dessous).

Parmi les patients hospitalisés dans l’étude initiale chinoise, 48% présentaient une comorbidité et en particulier un diabète ou une maladie cardiovasculaire (MCV). Les patients ayant un diabète représentaient 10 à 20% des personnes hospitalisées, 22% de celles admises en réanimation et 31% des décès, en notant que 48% des personnes décédées avaient une HTA et 24% une MCV, mais il n’est pas possible de dire si ces facteurs étaient indépendants ou liés à l’âge. Globalement, le diabète était associé à un odds ratio de mortalité hospitalière de 2,85 (IC95% 1,35-6,05, p=0,0062).
Il faut noter que nous ne disposons pas d’études ayant regardé le type de diabète, l’âge des patients diabétiques concernés ni la présence de complications et un appel à publication sur le thème « Diabetes and COVID-19 » vient d’être lancé par le Journal of Diabetes pour préciser les données. Il faut également noter que les résultats sont difficiles à interpréter car ils dépendent des critères d’hospitalisation qui évoluent avec le temps, les formes modérées étant de moins en moins hospitalisées lorsque l’épidémie progresse.

Un élément très rassurant est qu’aucun décès n’a été rapporté chez l’enfant de moins de 10 ans depuis le tout début de l’épidémie (y compris chez les nouveau-nés) et que les formes graves sont très rares chez les moins de 20 ans.

https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2762130?resultClick=1
https://www.thelancet.com/action/showPdf?pii=S2214-109X%2820%2930074-7
https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/articles/infection-au-nouveau-coronavirus-sars-cov-2-covid-19-france-et-monde
https://www.thelancet.com/action/showPdf?pii=S0140-6736%2820%2930566-3
https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2761044
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1753-0407.13027

 

Quelles sont les caractéristiques spécifiques de COVID-19 chez les personnes ayant un diabète ?
Les symptômes ne diffèrent pas en présence d’un diabète : toux, fièvre, courbatures, fatigue mais aussi parfois signes digestifs. En revanche, l’infection aura tendance à déséquilibrer le diabète (tout comme lors d’une grippe).
Ainsi, en présence d’une toux et d’une fébricule chez une personne ayant un diabète, l’absence de déséquilibre important du diabète est un élément rassurant allant plutôt contre COVID-19 – mais imposant, en situation d’épidémie, de rester chez soi.
COVID-19 va ainsi très probablement induire un déséquilibre du diabète avec un risque important de décompensation cétosique, y compris potentiellement chez certains patients ayant un diagnostic de diabète de type 2. Il faut donc insister sur l’intérêt d’une surveillance attentive du diabète et, en cas de suspicion de COVID-19, au renforcement de celle-ci, à la surveillance attentive du glucose et de l’acétone et à la mise en route des mesures de correction. Il faut insister sur le caractère éventuellement très rapide de la cétose (comme pour la grippe) et sur le fait qu’un bon équilibre préalable aide probablement à mieux gérer la situation.

https://www.diabetes.org/diabetes/treatment-care/planning-sick-days/coronavirus

 

Quels traitements faut-il (ne pas) utiliser en cas de COVID-19 ?
Très récemment, des informations ont été publiées vis à vis de différents traitements :

  • Les corticoïdes ont probablement un rôle délétère mais l’analyse rétrospective est difficile car ils sont généralement utilisés dans les cas (très) graves.
  • Les anti-inflammatoires non stéroïdiens comme l’ibuprofène augmenteraient le risque de forme grave comme cela avait déjà été rappelé par l’ANSM dans le passé pour d’autres infections. Ainsi, la fièvre doit être traitée uniquement par du paracétamol.
  • La Société Européenne de Cardiologie a publié une prise de position pour maintenir les traitements par IEC ou sartan.

https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)30317-2/fulltext
https://ansm.sante.fr/S-informer/Points-d-information-Points-d-information/Anti-inflammatoires-non-steroidiens-AINS-et-complications-infectieuses-graves-Point-d-Information
https://www.escardio.org/Councils/Council-on-Hypertension-(CHT)/News/position-statement-of-the-esc-council-on-hypertension-on-ace-inhibitors-and-ang

 

Quelles sont les précautions à prendre contre COVID-19 en cas de diabète ?

Ce sont d’abord les mêmes précautions que dans la population générale :

  • Lavage fréquent et prolongé des mains au savon ou avec un gel hydro-alcoolique a fortiori après un passage dans un lieu public, les transports en commun.
  • Éviter de se toucher le visage (bouche, nez, yeux) avec les mains.
  • Tousser ou éternuer dans un mouchoir en papier et le jeter immédiatement.
  • Éviter les contacts « sociaux » : pas de poignées de mains, ne pas s’embrasser – même avec les membres de la famille… Être à ce niveau particulièrement vigilant vis à vis des personnes âgées et/ou fragiles.
  • Éviter autant que possible les lieux publics et notamment là où le risque de croiser des personnes malades est maximal et en particulier les urgences des hôpitaux ou cliniques (si besoin appeler le 15) et respecter une distance de 1 mètre avec les autres personnes
  • S’isoler si on est malade.
  • Il faut savoir que le temps de contact nécessaire à la contamination exige une certaine durée (estimée à >15 min) et proximité (<1 m) de contact mais il faut aussi savoir que le virus est également excrété par voie fécale, nécessitant des précautions spécifiques dans certains cas.
  • Se méfier des « fake news » qui circulent…
 

Mais ce sont également des précautions à prendre pour la prise en charge du diabète :

  • Avoir le meilleur équilibre glycémique possible diminue probablement les difficultés de gestion du diabète au moment de l’épisode aigu.
  • Avoir de quoi « tenir » 2 semaines pour le traitement (insuline notamment) mais aussi le matériel de traitement (aiguilles, cathéters et réservoirs ou pods, schéma de remplacement, piles), le matériel de surveillance (capteurs, bandelettes pour sucre et acétone, lecteur, piles et/ou chargeur), sucre, kit de Glucagen.
  • Avoir du paracétamol en sachant que le traitement par paracétamol perturbe les résultats de mesure du glucose en continu avec les capteurs dont nous disposons actuellement en France - sauf avec le FreeStyle Libre dont les résultats peuvent en revanche être faussés par de hautes concentrations de vitamine C (il faut se méfier car certains en prennent à forte dose pendant cette période d’épidémie…)
  • Renforcer le rythme de surveillance du diabète a fortiori en cas de symptômes
  • S’assurer que la conduite à tenir est connue en cas de déséquilibre du diabète : recherche d’acétone, bolus de correction…
  • S’assurer que le patient possède tous les numéros d’urgences : 15, numéro du cabinet ou du service de diabétologie, numéros d’astreinte médicale et technique en cas de traitement par pompe.
  • Si vous pouvez mettre en place dès maintenant des moyens de télésurveillance avec vos patients (dans ou en dehors du programme ETAPES), cela peut constituer un point très positif pour discuter avec eux de leurs résultats et les aider à adapter leur traitement sans les obliger à se déplacer.
  • Le recours à la téléconsultation a été assoupli depuis le 12 mars sans que l’aspect technique ait été abordé pour l’instant.

https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(20)30113-4/fulltext
https://www.ameli.fr/cote-d-or/assure/remboursements/rembourse/telemedecine/teleconsultation

 

Quelle attitude adopter par rapport au travail ?
Une vague d’inquiétude a suivi l’allocution du Président Emmanuel Macron le 12 mars qui a demandé aux personnes atteintes de maladie chronique de rester chez elles autant que possible et nous sommes depuis extrêmement sollicités par des patients inquiets de savoir s’ils peuvent continuer à travailler. Ce 14 mars, ce point a été appuyé par le Pr Jérôme Salomon, directeur de la DGS.

Comme pour les personnes non diabétiques, aucun problème ne se pose pour celles et ceux qui peuvent travailler en télétravail ou qui ont besoin de rester chez eux pour garder leurs enfants : dans ce cas, ils doivent se rapprocher de leur employeur qui est seul habilité à déclarer un arrêt de travail sur Ameli.fr, cet arrêt étant rémunéré par l’état.

Pour ceux qui ne peuvent pas faire de télétravail, le gouvernement considère que les personnes fragiles sont celles présentant « un diabète insulinodépendant non équilibré ou présentant des complications secondaires à leur pathologie ». Les autres peuvent a priori continuer à travailler mais il faut insister sur un respect strict des gestes barrières et un renforcement de la surveillance du diabète. Un arrêt de travail est nécessaire pour les personnes fragiles dont la liste peut être trouvée dans le lien ci-dessous.

https://www.lci.fr/politique/video-coronavirus-l-allocution-d-emmanuel-macron-2147861.html
https://www.ameli.fr/assure/actualites/covid-19-des-arrets-de-travail-simplifies-pour-les-salaries-contraints-de-garder-leurs-enfants
https://travail-emploi.gouv.fr/actualites/l-actualite-du-ministere/article/coronavirus-questions-reponses-pour-les-entreprises-et-les-salaries
https://solidarites-sante.gouv.fr/actualites/actualites-du-ministere/article/coronavirus-qui-sont-les-personnes-fragiles
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/new_hcsp-sars-cov-2_patients_fragiles_v3-2.pdf

 

Ce texte correspond à la situation au 15 mars à 10h00. Bien entendu il est susceptible d’évoluer dans le temps en fonction de l’évolution de l’épidémie, de l’avancement des connaissances scientifiques et des décisions gouvernementales. Pensez à vous inscrire sur https://dgs-urgent.sante.gouv.fr/dgsurgent/inter/inscription.do?cmd=inscriptionFormulaire

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