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Les capteurs ont changé  la vie des patients diabétiques

Auteur : 
Entretien avec le Pr Jean-Pierre Riveline
QDM - Numéro : 
Le Quotidien du Médecin N°9901
Date parution : 
Vendredi 28 Mai 2021

Le Pr Jean-Pierre Riveline souligne l’intérêt clinique des capteurs qui permettent une mesure continue du glucose. Remboursés depuis le 1er juin 2017, ils concernent désormais 80 % des diabétiques de type 1, mais aussi certains diabétiques de type 2. Deux nouveaux capteurs viennent d’être commercialisés.

« C'est très important d’informer les médecins généralistes sur le développement des nouvelles technologies dans le domaine du diabète. Car les médecins spécialistes ne peuvent pas être les seuls à assurer le suivi de ces patients. Aujourd’hui, de très nombreux patients diabétiques de type 1 ou des diabétiques de type 2 traités par de multiples injections d’insuline, sont suivis par des généralistes. Et il est donc essentiel que ces derniers soient pleinement au courant des avancées permises par l’arrivée des capteurs », indique le Pr Jean-Pierre Riveline coordonnateur du Centre universitaire du diabète et de ses complications (CUDC) à l’hôpital Lariboisière à Paris.
Les capteurs permettent une mesure continue du glucose et remplacent quasi intégralement l’autosurveillance glycémique. « À l’exception de certaines situations ponctuelles où il faut quand même vérifier la glycémie capillaire. Mais, globalement, cela permet au patient d’arrêter de faire ses glycémies capillaires, avec une mesure en continu du glucose qui est très fiable », précise le Pr Riveline, en soulignant que ces capteurs donnent trois informations principales. « La glycémie, la flèche de tendance pour voir si c’est en train de monter ou de baisser, et le passé, notamment ce qui s’est passé dans les huit dernières heures. Certains capteurs permettent aussi d’alerter le patient quand il est en hypo ou en hyperglycémie et de le prévenir quand il doit se resucrer. »

En cas d’insulinothérapie intensive
Le remboursement de ces outils par la Sécurité sociale est bien sûr très encadré. « La fenêtre de remboursement est limitée aux patients traités par une insulinothérapie intensive et n’est pas accessible à ceux qui ont une seule injection par jour. C’est une question économique bien sûr mais cela est aussi lié à une insuffisance de preuves de l’intérêt médico-économique pour ces patients. Pour le Freestyle libre 1, le premier capteur qui a été commercialisé, le remboursement est possible pour tous les patients ayant moins trois injections par jour. Pour le Dexcom G6, le remboursement est limité aux seuls patients qui font des comas hypoglycémiques ou à ceux qui n’arrivent pas à descendre l’hémoglobine glyquée en dessous de 8 % », explique le Pr Riveline.
Aujourd’hui, l’analyse des données délivrées par ces capteurs reste encore du domaine du médecin spécialiste. « Mais des consortiums internationaux sont en train de travailler pour essayer de standardiser la lecture des informations délivrées par ces capteurs, un peu comme pour l’électrocardiogramme. Et on va clairement vers une simplification dans la lecture qui devrait permettre aux généralistes de s’impliquer pleinement dans l’appropriation de ces outils », indique le Pr Riveline, en soulignant l’importance prise par ces capteurs depuis quelques années. « L’accès au remboursement pour le Freestyle libre 1 est possible depuis le 1er juin 2017. Aujourd’hui, il concerne environ 80 % des diabétiques de type 1. On peut donc parler d’un véritable engouement qui s’explique par la facilité d’accès à la mesure continue du glucose sans faire de glycémie capillaire. Et on a aujourd’hui des données sur les bénéfices apportés par ces outils. On vient ainsi de publier un article dans Diabetes Care, montrant que les patients qui bénéficient du remboursement ont diminué leurs hospitalisations pour complications aiguës du diabète, notamment pour acidocétose. La diminution est significative, ce qui démontre clairement l’intérêt clinique de ces outils », insiste le Pr Riveline.

Antoine Dalat
Entretien avec la Pr Jean-Pierre Riveline,
coordonnateur du Centre universitaire du diabète et de ses complications (CUDC) à l’hôpital Lariboisière à Paris.